10 mai 2012
Hollande vote Sarkozy
RESISTONS ENSEMBLE / bulletin numéro 108 / Mai 2012
Hollande vote Sarkozy
« Présomption de légitime défense »
[ R I P O S T E dans les quartiers populaires ]
Essonne / Créteil / Clichy sous-bois
[ C H R O N I Q U E D E L ’A R B I T R A I R E ]
L’ « antiterrorisme » a bon dos
Villiers-le-Bel
Dans le silence, les schmitts en représailles
La police travaille à Hyères
Rétention, prison, agression, coma, handicap, expulsion ?
Sur le « non » létal
À bas les prisons !
[ L A P R I S O N T U E ]
[ A G I R ]
On n’oublie pas !
Procès « antiterroriste »
Soutien aux 5 inculpé-e-s anti-aéroport !
Surveillez la police ? Circulez, y a rien à voir !
Hollande vote Sarkozy
Sarkozy et sa clique ont été dégagés, mais ce n’est pas la joie car son successeur marche dans ses pas. Hautement symbolique à cet égard : Hollande a accepté le 8 mai, sans y être nullement obligé, de parader main dans la main avec son « adversaire »… pour « réconcilier les deux France ». Que Hollande soit mou ou méchant, peu importe, c’est sa fonction qui l’y oblige. Il est devenu président de l’État. C’est pour ça que Hollande va protéger et renforcer la marchandise puante qu’une partie de ses électeurs avaient cru avoir rejetée en chassant Sarkozy.
On ne parle pas du genre de promesses électorales qui « n’engagent que ceux qui y croient », mais du solide : son engagement à maintenir la répression, fondement de l’État. Et même d’en rajouter une couche.
Il s’agit des 22 lois liberticides dites « sécuritaires » depuis 2002, de la rétention de sûreté, de la BAC qui continuera à sévir impunément, des expulsions de sans-papiers, des enfermements en centres de rétention (attention, « gôche » oblige, « aménagés » pour accueillir les bébés), du contrôle plus strict de l’immigration « légale », de la création de « brigades spéciales » contre l’immigration « illégale », du recrutement de 1000 policiers par an, du maintien de l’interdiction du « voile intégral »…
Faut-il s’en étonner ? Franchement non. À l’origine du premier centre de rétention, partie prenante des premières lois « sécuritaires » et des entreprises de stigmatisation des « étrangers », c’est la « gôche » qui a pavé la route pour Sarkozy.
Alors Sarkozy, Hollande « bonnet blanc, blanc bonnet » ? Quant au fond certainement, quant à la forme non, avec Hollande il y aura une bonne couche de vernis rose.
Mais c’est dans la rue, à la tunisienne ou à l’égyptienne, que la donne pourra être changée.
« Présomption de légitime défense »
Le 21 avril à Noisy-le-Sec un policier tue, par arme à feu, Amine Bentounsi. Le flic affirme avoir tiré en état de légitime défense : le jeune homme de 28 ans, armé, l’aurait mis en joue. Mais voilà, l’autopsie révèle qu’Amine est mort d’une balle dans le dos et un témoin en voiture affirme avoir vu le policier tirer sur un homme en fuite. Puis le flic reconnaît durant sa garde à vue avoir fait feu sans sommation. Le 25 il est mis en examen pour « homicide volontaire ».
Heurtée pour le moins par ce chef d’accusation, la maison poulaga fait corps, les flics manifestent toutes sirènes hurlantes. En plein entre-deux-tours des présidentielles, les politiques s’empare du sujet : gesticulation médiatique, consensus autour du soutien aux forces de l’ordre.
Ressort alors le discours de circonstance avec cette logique puante qui voudrait justifier cet homicide en brandissant le casier judiciaire du jeune homme, ou la figure du « muti-récidiviste ». Le vocabulaire est choisi, emprunté au discours sécuritaire qui stigmatise l’étranger, le basané, le pauvre, le jeune des quartiers populaires, construisant une figure de l’ennemi. Dans leur bouche, la mort d’Amine n’a plus alors de sens, plus d’importance, le débat se déplace.
La police devient la victime, et Sarkozy déclare vouloir lui créer une « présomption de légitime défense ». Elle existe déjà dans la loi pour la gendarmerie, et a déjà été élargie à la police nationale a deux reprises dans l’histoire : sous le régime de vichy et entre 1958 et 62 dans le contexte de la guerre d’Algérie. Cette législation spécifique n’interdit pas pour autant le gendarme d’être mis en examen pour « homicide volontaire », mais encadrant l’usage de la force armée, lui permet de tirer dans le dos d’un fuyard pour peu qu’il ait été prévenu par un « Halte gendarmerie ». Dans l’exemple de Joseph Guerdner, ce gardé-à-vue menotté abattu alors qu’il tentait de fausser compagnie aux pandores, c’est le cas : le gendarme poursuivi pour « homicide volontaire » est acquitté. Il est extrêmement rare qu’un policier tueur soit condamné. Ils disposent donc, de fait, d’un quasi permis de tuer. Cette proposition de Sarkozy, puisée dans le programme de Marine Le Pen, avait une portée symbolique forte : renforcer les policiers dans leur bon droit, les mettre encore davantage au-dessus les lois.
Un rassemblement appelé par la famille et les proche d’Amine Bentounsi s’est tenu samedi 5 mai à Noisy le Sec et a réuni une centaine de personnes. Malgré la pression, la famille appelle à manifester partout en France contre la présomption de légitime défense et continue ses appels à témoins pour renforcer les premières constations et dires : Amine a été abattu dans le dos alors qu’il cherchait à fuir.
Manifestation le samedi 12 mai 2012 à 20h à Noisy-le –Sec devant le café du Celtique RER E, arrêt Noisy-le-Sec.
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Essonne : Le 29 Mars ,des projectiles, dont des parpaings, ont été lancés contre une voiture de la BAC en patrouille dans la cité de Tarterêts . Un policier a été légèrement blessé, une personne a été interpellée et mise en GAV. Le 13 avril ce sont des CRS dans le quartier de la Grande Borne à Grigny qui ont reçu des cocktails molotov. Non loin de là, à Saint Michel sur Orge, deux personnes qui étaient en train d’en préparer ont été interpellées.
La nuit du 5 Avril une station Autolib située dans le quartier Petit-Pré – Sablières à Créteil a été complètement incendiée. Pour les représentants de Bolloré propriétaire des 6 voitures, « c’est simplement une coïncidence liée apparemment à des contrôles de police dans le quartier ». De fait, depuis plusieurs jours la police ne cesse de harceler les jeunes et la veille, un contrôle s’est particulièrement mal passé : une patrouille a cherché à interpeller 4 jeunes apparemment en train de fumer quelques joints à bord d’une voiture, les jeunes ont résisté, vigoureusement soutenus par leurs mères venues leur prêter main forte ; l’une d’entre elle a même été blessée et sera transportée à l’hôpital : « un policier m’a donné des coups dans le ventre alors que je suis enceinte de 6 mois ». Sa famille a l’intention de porter plainte. 3 jeunes ont, quant à eux, été déférés devant le parquet de Créteil pour « violences en réunion » sur des policiers.
À Clichy sous-bois le soir du 2ème tour des présidentielles, « ça klaxonnait partout, c’était vraiment très festif, ça chantait, on se serait cru à une fête de mariage » puis, la police est passée : les jeunes ont riposté par des caillassages et brûlé deux voitures abandonnées.
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L’ « antiterrorisme » a bon dos
Les lois antiterroristes successives permettent de condamner à 10, 20 ans de prison « préventivement » sur la base d’un simple soupçon. Même, et vive le roi Ubu, on peut former une « association de malfaiteurs terroristes » tout seul ! Comme écrit le juge antiterroriste Trevic : « La protection des libertés individuelles se concilie mal avec le souci d’efficacité de la lutte antiterroriste. » Le « coup de filet anti-islamiste » a fait pschitt, la police n’a pas hésité à humilier les familles pour n’aboutir à rien, sauf à servir la campagne anti-islamiste du candidat Sarkozy. Martine Aubry est d’accord, elle est « pour la fermeté » ce qui la gêne c’est juste le « spectacle » autour.
Il s’agit bien d’une tendance générale : l’utilisation de « l’antiterrorisme » pour écraser toute contestation sociale. En Espagne, par exemple, le gouvernement veut criminaliser les « collectifs anti-système », les Indignés en leur appliquant la législation antiterroriste pour que, selon le gouvernement, « le système inspire davantage la peur aux gens ».
Villiers-le-Bel
Un des policiers impliqué dans l’accident qui a coûté la vie à Lakamy et Moshin en 2007, vient d’être mis en examen pour faux témoignage. L’expertise judiciaire contredit les déclarations des policiers quant à la vitesse à laquelle roulait leur véhicule. N’oublions pas, le 29 juin le procès pour homicide involontaire du policier qui conduisait la voiture.
Dans le silence, les schmitts en représailles
Ça s’est passé en octobre 2008 dans la cité des Bosquets à Montfermeil, des violences policières qui seraient passées inaperçues si elles n’avaient pas été filmées par un habitant de l’immeuble (voir RE69). Depuis Abdoulaye Fofana, molesté, puis accusé par les flics cherchant à se couvrir, a été innocenté, et les cogneurs condamnés pour la forme à 4 mois de sursis. Ce revers dérisoire ne passe pas pour les hommes en bleu, dans le quartier, l’occupation policière s’est durcie. Un habitant témoigne « Ils nous provoquent, nous parlent mal, nous contrôlent trois ou quatre fois par jour […] Avant, c’était une fois par semaine. Il y en a un qui m’a même traité de sale Noir. » Voilà une vendetta pas si exceptionnelle dont la médiatisation relative de l’affaire a permis la révélation - expression d’un quotidien violent des rapport police, quartiers populaires, le plus souvent passé sous silence.
La police travaille à Hyères
Un étudiant de 26 ans est accusé de « violences volontaires contre personnes dépositaires de l’autorité publique », son procès est prévu pour le 15 mai. Lors d’un contrôle routier le 25 mars, les flics prétendent avoir reçu deux coups de poing : 1 et 3 jours d’ITT. Ce qu’ils oublient de dire c’est que l’interpellation s’est soldée pour le jeune homme par une luxation de l’épaule gauche, avec fracture associée de l’omoplate, 21 jours d’ITT. Placé en garde à vue à 1h « Je me tordais de douleur. […] J’ai demandé un médecin. » il ne sera conduit à l’hôpital que 6 heures plus tard par l’équipe de relève.
Rétention, prison, agression, coma, handicap, expulsion ?
« Tous mes malheurs partent de là » : en juin 2008, Slaheddine Ouertani l’un des inculpés pour l’incendie du CRA de Vincennes a été incarcéré à Fresnes. Un matin de Novembre, il est retrouvé inanimé dans sa cellule : il a été agressé par son co-détenu qui déclare avoir été « dérangé par la présence d’un musulman dans sa cellule ». Il passera 3 mois dans le coma, 2 ans à l’hôpital dont il sortira handicapé à 80 %. Il portera plainte contre son agresseur et contre l’administration pénitentiaire. C’est alors au tour de l’Etat français d’être dérangé par sa présence : innocenté dans le cadre du procès pour l’incendie du centre, il se retrouve aujourd’hui menacé d’expulsion suite à l’OQTF que lui a signifiée la préfecture du Val-de-Marne alors qu’il tentait de renouveler son titre de séjour provisoire obtenu, en un premier temps, pour raisons médicales.
Sur le « non » létal
À lire absolument : Le son comme arme, éd. La découverte, 2011, de Juliette Volcler. « Les années 2000 ont vu se développer un usage répressif du son, symptomatique de la porosité entre l’industrie militaire et celle du divertissement, sur les champs de bataille et bien au-delà. Rap, metal et même chansons pour enfants deviennent des instruments de torture contre des terroristes présumés. Des alarmes directionnelles servent de technologies « non létales » de contrôle des foules dans la bande de Gaza comme lors des contre-sommets du G20, à Toronto et à Pittsburgh. Des répulsifs sonores éloignent des centres-villes et des zones marchandes les indésirables, adolescents ou clochards.
Au passage, après quinze ans d’essais, l’armée étasunienne a dévoilé son « Active Denial System », sans l’avoir utilisé sur le terrain. Cette arme envoie jusqu’à 1 km des ondes électromagnétiques ciblées, invisibles et inodores, provoquant une chaleur immédiate et insupportable qui pénètre sous la peau. « Pas au-delà d’un demi-mm »... C’est « l’arme de défense la plus sûre jamais mise au point » nous rassure l’oncle Sam.
À bas les prisons !
Celle de Vezin-le-Coquet près de Rennes ,ouverte en 2010, est l’une de ces nouvelles prisons qui limite les « contacts humains » et n’est pas non plus à l’abri de la surpopulation. Faouzi Harbaoui qui y purgeait une peine de 23 ans de réclusion voulait la quitter à tout prix : il a d’abord écrit plusieurs courriers et fait une grève de la faim ; resté sans réponse, il a dû prendre les choses en main et tenter de s’enfuir le 27 Mars en déclenchant une mutinerie avec 12 de ces camarades. Deux jours plus tard, il a été condamné avec l’un d’entre eux à 5 ans supplémentaires alors que deux autres ont écopé de un et deux ans. Tu parles d’une réponse !
> [ L A P R I S O N T U E ]
Le 07 mai, un homme de 36 ans s’est suicidé à la Maison d’arrêt d’Angers, 3 jours après sa condamnation. Depuis début 2012, il est la 32ème personne décédée en détention, suicide ou mort suspecte connue. Source prison.eu.org
> [ A G I R ]
On n’oublie pas !
marches commémoratives : le 12 mai à Grasse pour Hakim Ajimi tué par la police, 14h en haut du boulevard Victor Hugo – le 9 juin à Argenteuil pour Ali Ziri, infos : http://atmf.org/-Verite-et-justice-pour-Ali-Ziri – le 16 juin à Paris 20e pour Lamine Dieng, 14h au 58 rue des Amandiers, Métro Père-Lachaise.
Procès « antiterroriste »
Du 14 au 22 mai, six camarades passent en procès accusés d’« association de malfaiteurs à finalité terroriste », cad : sabotage de la circulation des trains lors du mouvement anti-CPE en 2006, fabrication de fumigènes artisanaux et de crève-pneus destinés à une manif devant la prison pour étrangers de Vincennes en 2008, etc. RDV le 14 mai à 13h30 pour la 1ère audience - 10e chambre - TGI Paris (Métro Cité). Infos : http://infokiosques.net/mauvaises_intentions
Soutien aux 5 inculpé-e-s anti-aéroport !
Le 20 octobre une 50aine d’opposant-e-s à l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes manifestaient devant les locaux de Vinci à Couëron, en déposant symboliquement du fumier sur le perron. La multinationale a porté plainte… Le 16 mai à Nantes, jour du procès : 12h, Place du Cirque départ en déambulation, 14h rassemblement devant le palais de justice. Infos : http://soutieninculpeesnddl.wordpress.com/
Surveillez la police ? Circulez, y a rien à voir !
Michel voit des policiers brutaliser des jeunes gens. Il sort son appareil pour filmer, ce qui est tout à fait légal mais pas du goût des flics : tabassage, garde à vue, fausse déclaration des flics. Michel passera en jugement le 21 juin à 14 h, au Tribunal de Grande Instance de Marseille, 11ème chambre, section A. Lire le témoignage sur http://resistons.lautre.net/spip.php?article498