Des barbelés « humanistes » ?

bulletin numero 145 - octobre 2015


9 octobre 2015


Des barbelés « humanistes » ?

RESISTONS ENSEMBLE / bulletin numéro 145 / octobre 2015


Des barbelés « humanistes » ?


Il y avait déjà des milliers de morts en Méditerranée, les survivants, par dizaines de milliers essayant de « passer » à partir de l’Italie et de la Grèce vers l’Europe « riche ». Puis ce printemps ça a changé de dimension. Des centaines de milliers d’hommes, femmes et enfants ont entamé une longue et périlleuse marche à travers l’Europe, venant d’Afghanistan, d’Irak, de Syrie, de Soudan… De partout où la barbarie capitaliste sévit, par les guerres, les dictatures, les destructions climatiques.
Et c’est devenu grave pour les puissants. Les réfugiés ont mis en danger les bijoux de la couronne européenne, les accords de Schengen, les frontières. Le patronat allemand ordonnera à Merkel de fermer les portes, une fois que ses besoins en main d’œuvre pas chère auront été satisfaits.
Et d’un seul coup, la petite Hongrie accusée hier d’« inhumanité », va devenir peu à peu le chevalier héroïque qui défend la frontière extérieure Schengen, et par là, « l’Europe chrétienne » face à aux « envahisseurs », souvent appelés musulmans, sinon traités de possibles « terroristes ».
On commence à entendre ici et là que finalement le rideau de fer hongrois ce n’est pas si mal que ça, que du côté de la Grèce et de l’Italie il faudrait y penser pour arrêter le flot, que les frontières « intérieures » mortifères de Vintimille et Calais sont à généraliser. De par la répression « sécuritaire », l’Union européenne suit de plus en plus l’exemple hongrois des lois « anti-immigrés », mais aussi celui des dictatures qu’elle condamne « officiellement ».
Puis, les puissants ont aussi décidé d’agir à la « source ». Pas contre les guerres, ni contre les divisions créées par les frontières coloniales des peuples du Moyen Orient et d’Afrique, mais non, ils versent l’huile sur le feu qu’ils ont eux-mêmes allumé. Les bombardiers US, français et russes déversent leurs cargaisons sur les populations civiles, les hôpitaux. Et les dictatures diverses et variées, Daech compris s’en sortiront renforcées.
Pourtant, qu’on le veuille ou pas, c’est une nouvelle période qui s’ouvre. Sans réaction, ce qui reste des conquêtes gagnées par la lutte sera carrément balayé par cette nouvelle Europe. Alors, que faire ? On en est là. Face à cette nouvelle guerre, qui n’est qu’à ces débuts, guerre qu’on veut faire passer pour une lutte contre le « terrorisme »… pas de manifs, rien, c’est une première.
Ce sont les plus misérables et opprimés qui montrent le plus de courage et de résistance. Ce sont ces réfugiés qui forcent la frontière de la Macédoine, qui marchent à travers Budapest et s’engagent sur l’autoroute, qui campent sur les rochers de Vintimille, qui détruisent les barbelés, soi-disant « humanistes », et qui s’enfoncent dans le tunnel de Calais.
Ce sont eux qui nous poussent à reconstruire les liens de solidarité et de résistance, ce sont eux qui nous montrent un chemin d’espoir.



« Liberté, humanité et dignité » : « We are not coming back ! »
À Paris, Le 17 septembre, à 6 h du matin, préfecture et mairie ont à nouveau envoyé leurs troupes pour évacuer le campement de réfugiés d’Austerlitz (en place depuis de nombreux mois) et de la mairie du 18ème arrdt en place depuis 15 jours. Le dispositif est désormais bien rodé : les responsables de l’Ofpra ne prennent même plus la peine de se déplacer, ce sont des fonctionnaires de la pref ou de la mairie qui, accompagnés de très nombreux flics, annoncent aux réfugiés qu’ils seront logés dans des centres pendant un mois et les font monter dans des bus dont ils ignorent la destination. Les chargés de com de la préfecture expliquent quant à eux aux journalistes comme tout a été bien fait pour « accueillir » et « mettre à l’abri » les réfugiés. A 9 h, les services de propreté arrivent pour nettoyer et désinfecter les lieux. Mais dès 10h certains réfugiés commencent à appeler les militants avec lesquels ils ont tissé des liens : les centres sont parfois très éloignés de Paris, les chambres sont sales, surpeuplées, il manque des lits, il n’y a pas les tickets repas ou transport promis…
Au centre de la place de Clichy géré par l’association Aurore, constatant que leur situation ne s’est pas améliorée depuis 3 mois, que les promesses faites n’ont pas été tenues (pas ou peu de tickets de transport, absence de suivi médical et juridique…) les réfugiés sont en grève de la faim depuis le 27 septembre, ils protestent aussi contre le mépris raciste avec lequel les traitent bien souvent les travailleurs d’Aurore. Des rassemblements sont organisés pour les soutenir.
À Vintimille, le 30 septembre, la police a évacué et détruit le campement no border en place depuis 3 mois, activistes et réfugiés présents se sont réfugiés sur les rochers au bord de mer. Un activiste est arrêté et maltraité, 20 migrants sont arrêtés et embarqués dans un avion pour une destination inconnue.
À Calais, des milliers de migrants sont encore forcés de vivre dans un camps très loin du centre-ville baptisé « new jungle », ils subissent de plus en plus fréquemment les attaques de groupes fascistes : depuis juin au moins 9 réfugiés (cas connus par les militants), tous noirs ont été enlevés par les passagers d’une voiture noire, emmenés dans un bois où ils ont été tabassés à coups de poings, pieds et barre de fer puis aspergés de gaz lacrymo. Une enquête a été ouverte par les policiers mais n’avance en rien dans une région où ils sont pourtant omniprésents.
Dans la nuit du 2 octobre, 100 migrants ont pris d’assaut le tunnel sous la Manche après avoir ouvert une brèche dans les barbelés qui entourent la zone : le trafic a dû être interrompu mais ils n’ont été rattrapés qu’après avoir parcouru 16 km, l’un d’entre eux est cependant parvenu à poursuivre sa marche : il a été arrêté à la sortie du tunnel et risque de la prison ferme (en Août, un autre réfugié avait réussi le même exploit : il doit être jugé en janvier). Cette action collective avait un sens politique clairement assumé mais quasiment chaque soir des migrants bravent les nombreux dispositifs de sécurité souvent au péril de leur vie (16 morts depuis juin dont un mineur africain percuté par un train le 24 septembre et un syrien électrocuté le 17).



> [ C H R O N I Q U E D E L ’ A R B I T R A I R E ]


Les cognes et la novlangue
Dans la soirée du 15 septembre à Toulouse, deux individus, apparemment amis de longue date, s’embrouillent et en viennent aux mains. Des CRS présents dans les parages tentent une interpellation. Un des gars ose répondre aux flics, il est roué de coup ce qui entraîne une réaction de la population. Les renforts arrivent rapidement : 5 fourgons de CRS autant de voitures de flics sans compter la police municipale… Molosses, LBD (lanceur de balles de défense), gazeuses, les cognes sont à cran. Un homme intervient et reçoit un coup de gazeuse à bout portant et un coup de matraque dans le menton. Un autre est embarqué violemment. Dans un fourgon quelques CRS finissent de tabasser un des interpellés.
Sans surprise la version policière est à l’honneur dans la presse. De tous les témoins, aucun n’a pu constater de violence sur agent, pourtant les flics se retrouvent avoir été « violemment agressés par un groupe d’une cinquantaine de personnes. » « L’un des agresseurs a même tenté d’enfoncer une clef de voiture dans le crâne d’un policier. »
Source : https://iaata.info/Les-feroces-de-l-ordre-s-invitent-au-Groland-818.html

Mehdi Bouhouta tué par la police
Le 3 septembre 2015 à Ste Foy-les-Lyon le jeune homme de 28 ans a été tué de deux balles en pleine tête par un inspecteur de police d’Oullin. L’administration parle de légitime défense : il aurait cherché à renverser l’un des leurs. Il faisait l’objet d’un mandat d’arrêt pour n’avoir pas respecté une mesure d’aménagement de peine. Son frère à une autre version : « il est venu me voir dans le snack où je travaille. La police est passée en bas, l’inspecteur qui lui a tiré dessus était là. » Il lui dit de l’attendre chez lui, Mehdi s’y rend en voiture mais reste au bas de l’immeuble. La police le trouve là, « pour se sauver il a voulu pousser la voiture de police et le policier a tiré deux balles à travers la vitre. »
Source : http://rebellyon.info/Mehdi-Bouhouta-28-ans-assassine-par-la


Ils ont gagné, encore une fois la lutte paie…
pour les 2 professeurs du collège Gay-Lussac à Colombes (92), Oscar et Gari, en grève de la faim pendant 15 jours pour protester contre leur conseil de discipline. Pourquoi ? Pour avoir participé en 2014 à des grèves et blocages pour que leur collège reste dans l’éducation prioritaire. Autour d’eux une majorité de collègues, des parents, des élèves anciens et actuels ont construit la mobilisation. Le rectorat a dû reculer, le conseil de discipline n’aura pas lieu.
Un climat répressif s’étend dans l’éducation : au collège Bellefontaine à Toulouse, J-F Chazerans à Poitiers… pour alimenter la caisse de grève : https://www.leetchi.com/c/solidarite-de-les-enseignants-du-college-gay-lussac-de-colombes


NDDL : Tentative vaine d’expulsion, le combat continue !
Revenant sur les engagements pris en 2012 et 2014, le gouvernement n’a pas attendu les appels des recours pour tenter de faire expulser la ZAD de Notre-Dame-des-Landes le 22 septembre. La ZAD bloquée en 6 points d’accès par des barricades, plusieurs centaines de personnes et une trentaine de tracteurs sont venus empêcher l’arrivée du juge des expropriations et répondre avec détermination aux menaces du sous-préfet. Celui-ci annonçait reprendre les procédures contre les locataires en vue d’une possible expulsion et le démarrage des chantiers dans les mois à venir. Venu faire le sale boulot, le juge a été stoppé net dans sa mission répressive : le mouvement anti-aéroport continue donc sa route, bien déterminé à faire arrêter ce projet nuisible.


Pour avoir dénoncé les conditions de vie dans un camp de Rroms à Strasbourg…
La Feuille de chou, média libre de la ville dédié à l’actualité des mouvements sociaux, a été attaqué en justice par le responsable de la Mission Rroms de la ville. Un appel à soutien a donc été lancé afin de défendre, après le Jura Libertaire (voir RE n°141) et IAATA.info (voir RE n°142), la liberté d’expression, notamment celle de dénoncer des politiques répressives anti-sociales que les gouvernements font passer en notre nom.
Pétition : http://www.petitionpublique.fr/PeticaoVer.aspx?pi=P2015N48059
 ; Comité de soutien liste des organisations et personnalités déjà signataires : http://la-feuille-de-chou.fr/archives/84403

Les inculpés de Labège
Il y a 4 ans des militants qui soutenaient une révolte des jeunes détenus dans un établissement pour mineurs sont inculpés. Leur procès a eu lieu le 29 septembre 2015. Le parquet réclame 6 mois avec sursis pour les prévenus présents et 6 mois ferme pour celui qui était absent. Rendu le 3 novembre.

Deux détenus réclament leur transfert
Deux détenus du centre pénitentiaire de Vivonne sont montés sur un des toits de la prison pour protester contre les conditions d’enfermement et réclamer leur transfert.

Salle comble et débat intense le mercredi 7 octobre pour la sortie nationale
du film « Qui a tué Ali Ziri » de Luc Decaster à l’espace Saint Michel à Paris. Désormais le film parcourra la France, il pourra aider le combat pour la « Vérité et Justice » pas seulement pour Ali Ziri mais aussi pour les autres victimes de la police. Info pour les séances : http://www.zeugmafilms.fr/actualites.html




> [ A G I R ]


Manifestation nationale pour Georges Abdallah
Combattant arabe de la cause palestinienne, il est emprisonné en France depuis plus de trois décennies. Le 24 octobre 2015 (jour où il entrera dans sa 32e année de détention) manifestation nationale à Lannemezan, devant sa prison.

Samedi 17 octobre, à Nanterre, nous marcherons contre l’oubli
L’oubli du massacre du 17 octobre 1961, des centaines d’Algériens, et parmi eux de nombreux Nanterriens, jetés à la Seine, assassinés par la police aux ordres de son préfet à Paris, un certain Maurice Papon. La République colonialiste appliquait ces jours-là en métropole la terreur coloniale vécue depuis des décennies en Algérie. Contre l’oubli de la violence sociale et politique quotidienne dans les bidonvilles de Nanterre et d’ailleurs… La solidarité est notre seule arme ! Résistons ensemble !
 Ni oubli ! Ni pardon ! » 11h - Marché du Chemin de l’île
 RER A Nanterre-Ville.
L’appel complet : https://paris-luttes.info/marche-contre-l-oubli-d-hier-a-3846

La solidarité avec les réfugiés et migrants en procès
Quatre personnes sont poursuivies pour « séquestration » et « refus de se soumettre aux prélèvements biologiques ». Leur seul tort a été de soutenir à leur demande les réfugié-es hébergé-es dans un centre d’Emmaüs Solidarité rue Raymond Losserand. Manifestons notre solidarité le vendredi 9 octobre, à 9h, 24e chambre correctionnelle, Palais de Justice, 10 Bd du Palais, Paris 1er, Métro Cité Info : http://paris.demosphere.eu/rv/41360.

Lyon : Le CSAO - Le Harraga
organise un week-end contre les crimes sécuritaires, les violences policières et le racisme d’état, les 16 et 17 octobre prochain. Le programme : http://csao-harraga.squat.net/?p=263

Un beau docu
mis en ligne par l’agence IM’media, datant de 1987 sur une cité de transit de Nanterre où chacun, jeune ou vieux, a décidé de refuser de subir passivement l’oppression au quotidien https://www.youtube.com/watch?v=DROCFVcfwz4

Marche pour Amadou Koumé, tué par la police
Rdv le 10 octobre 14 h à Paris à la Gare du nord. Soyons nombreux afin de montrer en force qu’on n’oublie pas, qu’on ne lâchera rien... !