18 janvier 2005


Qui est l’agresseur, qui est l’agressé...

Témoignage


Au départ une file d’attente (50 personnes peut être), des gens qui discutent patiemment, dans une ambiance normale, « bon enfant », chacun se demande combien de temps on va devoir attendre et s’il y aura encore de la place sachant que le DJ est très réputé et qu’il n’y a jamais autant de monde habituellement à cette heure ci, mais c’est justement l’occasion de rigoler entre petits groupes d’amis et de faire connaissance... et au pire il y a pleins de possibilités autour pour aller boire un verre et revenir plus tard, ou carrément une autre fois : si nous sommes arrivés un peu tard pour rentrer nous n’avons qu’à nous en prendre à nous-mêmes après tout !

Puis une personne apparemment refoulée à l’entrée alors que ses copains ont eu l’autorisation d’accéder au lieu, s’énerve, ne comprenant pas la décision des videurs. Cette personne sous l’effet de drogue(s) avait une allure inquiétante (il semblait qu’elle venait de se vomir dessus et ne c’était pas rincé la bouche !) se met à « péter un plomb » et devient très violente : elle arrête les voitures et donne des coups de pieds dedans, ouvre une portière et frappe le passager avant, insulte les videurs, etc. Quelques personnes qui faisaient la queue comme moi se rapprochent d’elle pour tenter de comprendre et la calmer un peu, elle se calme un peu, puis repart aussitôt dans sa colère en criant « je vais leur pourrir leur soirée » (en parlant des videurs). Elle lance au dessus de l’entrée de la soirée une bouteille de verre qui traînait par terre, plusieurs éclats de verre touchent la file d’attente et une dizaine de personnes l’encerclent pour la neutraliser et l’écartent un peu de l’entrée de la soirée.

A ce moment là arrive la police. Je me dis : ça tombe bien elle arrive au bon moment (5 min après le début de l’incident, efficacité redoutable !), les choses vont se régulariser simplement, la personne dangereuse sera interpellée et je rejoindrais mes amis restés dans la file d’attente !

Voilà comment ça c’est passé : ce sont 5 ou 6 voitures de police qui arrivent en même temps, passant devant la file d’attente, 10 à 15 policiers sortent avec matraques dans les mains, certains mettent un casque anti-émeute et ont un bouclier, d’autres sont de jolies demoiselles sans doute pour faire boulier naturel ! En tant que témoin de ce qui venait de se passer je me dirige vers un policier pour lui expliquer où se trouve la personne dangereuse et qu’il n’y a pas de raisons de s’énerver comme ça ! Je n’ai pas le temps de dire ouf que trois ou 4 policiers m’attrapent fermement en me disant « vous êtes qui pour nous parler comme ça », alors que je n’avais pas encore fini ma première phrase ! Je réponds : « je voulais juste vous dire ce qui vient de se passer pour faciliter votre travail ». Réponse : « vous êtes sur la voix publique, mettez-vous sur le trottoir ». J’exécute et je me demande ce qui va se passer car la majorité des gens qui font la queue ou presque sont sur la voix publique ! Je précise que cette rue en double sens est très passante les soirs de fin de semaine et que les voitures sont obligées de rouler au pas à cause des embouteillages ! Je tente une nouvelle fois de parler aux policiers sur le trottoir de l’autre côté de la route (je crois parler au chef de l’équipe qui se tient un peu en retrait par rapport à l’entrée du lieu). Il me répond :« rester sur le trottoir s’il vous plait la situation peut dégénérer à tout moment ». Je dis : « Les casques anti-émeutes sont-ils vraiment nécessaires ? N’est ce pas de la provocation ? ». Il répond : « nous avons un collègue qui a perdu un œil comme cela ». Je dis « Ok, très bien » et je reste sur le trottoir.

J’assiste à ce moment là à l’encerclement de la file d’attente par l’escadron de police depuis l’autre côté du trottoir. Je crois halluciner ! Certains policiers poussent les gens qui attendent, je crois voir quelques coups de matraques et plusieurs personnes extraites de la file. Je décide qu’il faut partir de suite de ce guêpier et je traverse la rue pour attraper mes amis qui sont encerclés. J’arrive à traverser sans qu’on m’attrape ! Et je passe du côté des gens encerclés. Je tente de rediscuter avec une charmante policière, je n’insiste pas, je rejoins mes amis et alors que nous sommes en train de partir, je dis à un copain qui essaye courtoisement de discuter avec une autre policière : « laisse tomber c’est pas la peine de discuter on s’en va ». A ce moment là, le policier à qui j’avais essayé de parler en tout premier se rapproche par derrière de sa collègue et m’envoie une salve énergique de bombe lacrymogène dans les yeux. Mes amis m’évacuent un peu plus loin. 10 minutes plus tard je réouvre les yeux et tente de comprendre. Mes amis me disent plusieurs choses dont « la policière a engueulé son collègue et s’est pris elle aussi plein de lacrymo ! »

Aujourd’hui je reste un peu choqué, j’ai toujours les yeux et la bouche qui piquent et je suis désespéré de voir ce qu’est la police ! Si dans une situation aussi bénigne, anodine, et alors que tout est réglé ou presque quand elle arrive sur les lieux, elle se sent d’emblée agressée, et que sa réponse aux mots est la violence verbale et physique, la démonstration de force et la seule application stéréotypée de procédures rigides et inappropriées, je me demande comment elle peut gérer des problèmes graves, et je ne suis pas étonné des dérapages multiples qui existent. Bien que je ne sois pas né de la dernière pluie et que j’en ai vu d’autres....

Il faudra qu’on m’explique ce qu’est la tolérance zéro, qui est l’agresseur et l’agressé, qui est coupable ou innocent ?