8 juillet 2009


Délation


Cet évènement a eu lieu en France, pays des droits de l’homme (blanc).

Un vendredi après-midi de mars 2009, à Paris, je rentrais chez moi. Devant mon immeuble, je vis un attroupement de volailles en train de parler avec le concierge. Ce dernier m’apprend qu’ils sont à la recherche d’un sans-papiers qui serait caché par quelqu’un dans l’immeuble, suite à la dénonciation bienveillante d’une personne préférant rester anonyme. Heureusement, ils ne savaient apparemment pas dans quel bâtiment, ni à quel étage ils devaient chercher.
Sachant que ma voisine pouvait être la personne hébergeant ce "dangereux" individu (il y avait plus de 10 flics dans l’immeuble), j’allai la prévenir. Paniquée, elle se dit qu’il valait mieux le cacher chez une amie vivant à cinquante mètres de l’immeuble, car elle appartient à RESF, et a l’habitude de gérer ce genre de situation. Mais pour cela, il fallait que la flicaille soit éloignée de l’immeuble. Après hésitations, je décide d’aller leur dire que j’avais vu un noir sortir de l’immeuble en courant vers telle rue. Mais serai-je crédible face aux vaches ? J’en doutais.
C’est alors qu’en prenant l’ascenseur (pour aller faire mon cinéma aux poulets), j’y rencontre l’Elu. Pour résumer, disons que cette personne considère Sarkozy comme un putain de gauchiste. J’ai tout de suite pensé que ce facho serait plus crédible que moi pour parler aux condés. Je lui dit sur un ton alarmiste "Vous savez que la police recherche un sans-papiers dans l’immeuble ? Je ne suis pas sûr que ce soit lui mais j’ai vu un noir sortir de l’immeuble en courant vers la rue de E". Il me demanda, l’air en trans’ : "Vous l’avez dit aux policiers ?" "Non" lui répondis-je. Et en sortant de l’ascenseur, il fût trop heureux d’aller prévenir monsieur l’agent que le dangereux sans-papiers avait pris la fuite rue de E.
Nous avons ensuite attendu quinze minutes environ pour être sûrs que la maison poulaga s’était bien éloignée, puis nous l’avons amené chez l’amie de ma voisine.

Grâce a la complicité involontaire d’un facho, on a donc réussi à éviter l’expulsion de ce sans-papiers sénégalais (les colons français ont-ils eu besoin de pièces d’identité pour coloniser le Sénégal ?).

Malheureusement, à peine deux semaines plus tard, j’ai appris que ceux qui l’ont caché par la suite ont été, je vous le donne en mille, dénoncés par un voisin anonyme (évidemment).
Ils risquent une lourde amende et de la prison ferme, alors que celui qu’ils hébergeaient a été renvoyé au Sénégal.

Voici donc les faits :
En France, en 2009, cet homme arrivé clandestinement du Sénégal il y a neuf ans a vécu de petits boulots avec une paye misérable, payait des impôts, a connu toutes sortes de discriminations, etc. Il vivait avec une femme en situation régulière. Mais depuis environ trois ans il ne pouvait plus rester chez elle, il se sentait traqué par la préfecture et la police (bref par l’Etat), et allait de cachettes en cachettes. Et ceux qui le cachaient risquaient la prison. Pour finir il a été arrêté sur dénonciation du voisinage. Le raccourci peut paraître facile, mais franchement, cela rappelle les heures les plus sombres de notre histoire contemporaine. Car n’oublions pas qu’en 1941, la plupart des français n’ont pas résisté mais collaboré (activement ou passivement certes, mais ils ont collaboré).

France, pays des droits de l’homme (blanc).